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Fallait-il que soit inventé l'essuie-glace ou qu'un peu plus de considération s'instaure entre transportés et conducteurs pour qu'enfin, averses et bourrasques se cachent derrière une vitre...?

- KELEREPUS, 17 décembre 2021. A l'heure où l'on ne cesse de parler de cette automobile autonome, connectée et intelligente, la vision du cocher en haut de son perchoir, à l'avant de la diligence et droit face aux ondées, parvient parfois à choquer. Rarement, mais quand même...? Qu'avaient-ils en tête, ces inventeurs des premières automobiles, par ailleurs si talentueux, pour ne pas avoir seulement songé à mettre à l'abri conducteurs et même voyageurs...? Quelle mentalité, nom De Dion...! A leur décharge, ils prolongeaient ce qui s'était fait non seulement avec les voitures hippomobiles, mais aussi sur les premières locomotives, sur l'impériale des transports urbains ou, pour le poste de conduite des tramways. Tant pis pour le sort frileux et humide que supporterait sans broncher le courageux et stoïque wattman. Reconnaissons d'ailleurs que derrière les croupes en mouvement de quelques athlétiques percherons, mieux valait être dehors et en hauteur pour analyser terre, flaques, bosses et ornières des chemins, guider avec les longues rênes tout cuir les chevaux sans vapeur et leur hurler des ordres sur un ton nécessaire à l'obéissance. Ceci sans même évoquer un petit coup de fouet parfois nécessaire, incompatible avec un pare-brise feuilleté. Si de plus, une vitre avait été placée pour seulement protéger ceux qui, au demeurant, n'étaient "que les cochers", autrement dit "que" de simples domestiques, que se serait-il passé à la première giboulée empêchant ne plus rien voir...? 

Un raisonnement qui ne tient plus avec les véhicules sur rails, pas plus qu'avec ces automobiles par ailleurs si novatrices. D'autant qu'avec la vitesse croissante, ce ne sont pas que les caprices du ciel qui sont à redouter. Moucherons et autres insectes ne sont pas plus agréables que les bises aigrelettes du bonhomme hiver. Au début du siècle, au moins un brevet (1903, pour le premier essuie-glace) aurait pu et dû entraîner un rapide et décisive évolution. Mais deux décennies plus tard, et alors que la Grande Guerre est terminée depuis plus de cinq ans, au volant de leurs Renault TN-4, les chauffeurs des autobus parisiens, un peu mieux protégés quand même, restent cependant toujours à l'air libre. Tout comme ceux qui pilotent les antiques Schneider-II, autobus commandés à 1269 exemplaires à partir de 1916 par la CGO (Compagnie Générale des Omnibus), totalement exposés aux humeurs de Borée, et qui devront attendre le début des années 30 pour enfin recevoir un simple pare-brise*. C'était déjà ça. A Paris et dans bien d'autres villes, en bus ou camions, ils resteront encore longtemps, au moins partiellement, face aux vent mauvais et à ces pluies qui mouillent. Car en revanche, être coincés plusieurs heures dans un compartiment fermé, lorsque la chaleur estivale sévit, n'est guère plus agréable. D'ailleurs, il ne leur vient peut-être pas à l'idée de s'offusquer d'une condition partagée par tant de chauffeurs dans leurs voitures de maîtres, au cœur des mêmes embouteillages. Pire encore, comment ne pas s'étonner du peu de cas fait pour ces passagers expédiés aux places les plus hautes, sans la protection d'une petite toile, que le véhicule soit tracté par des chevaux, des bœufs ou des cylindres rugissants. Toutefois, dans ces déplacements dans l'air, chauffeurs et usagers n'avaient pas conscience de vivre avant l'heure ce qui est depuis devenu un luxe rare, se balader cheveux au vent, par tout temps, dans un cabriolet né alors que déjà, nos cours de récréations s'animaient des têtes blondes du baby-boom...

* Source : "Le patrimoine de la RATP", ouvrage paru aux Editions Flohic.

 

 

Tag(s) : #- ACTUS, #- AUTOS D'HIER
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