AUTOMOBILE ET TV, quand les autos faisaient bouger les lignes... Insupportable...!

11 Décembre 2024

L'automobile est arrivée bien avant la télévision. Ce qui ne l'a pas privée d'une réputation détestable quand elle circulait là où quelques défricheurs privilégiés regardaient déjà Jean Nohain...

- KELEREPUS -

- KELEREPUS, 11 décembre 2024. Entre les bons effets et les perturbations, il n'y a parfois qu'une sensation de discordance. Assis autour de la table de la cuisine, ou de la modeste salle à manger, -on ne parle pas encore de "pièce à vivre"-, ils regardent la petite -adjectif dimensionnel bien adapté- lucarne. Ils sont parmi les ménages encore très peu nombreux à s'être dotés de cet instrument incroyable, qui permet de découvrir le monde. Certes, sur une diagonale mesquine d'une quarantaine de centimètres, sans rien d'autre à admirer que des nuances de gris, puisque le noir n'y est pas si noir que ça, et que le blanc reste loin de celui promis par des lessives qui lui ajouteraient l'éclat (Certains, pas si jeunes, reconnaîtront quelques traces de slogans des réclames d'alors). Ce "alors" se situe vers la fin des années 1950, avant que le seuil de 30% de ménages motorisés ne soit finalement atteint en France début 1960. Autant dire que les rencontres entre cette télé des temps héroïques et les autos d'hier ne sont pas très nombreuses. Mais quand même, elles se multiplient. Et alors que les téléspectateurs voient 36 chandelles* s'animer sur leur écran, ils constatent aussi que des étranges déformations de l'image surgissent. Comme par hasard quand un voisin démarre, au volant de son Aronde, ou sa Dauphine, ou quand passe l'une de ces fascinantes Traction et déjà quelques OVNIS genre DS. Du jamais vu, mais pas pour autant supportable, d'autant plus que de saison en saison, ces perturbations, comme les taux de possessions, suivent une courbe ascendante. Jusqu'au jour où, n'y tenant plus, il a fallu prendre des mesures. L'allumage (de l'auto) issus de l'étincelle que le doigt du rupteur provoque à chaque tour de moteur est la source de ces faux signaux que les moyennes fréquences de la partie réceptrice du téléviseur utilise, croyant bien faire, pour réorganiser certains des 819 lignes qui balayent l'écran. Ajoutons que la télévision, modulée en amplitude, est sensible aux nervosités électriques. En langage de quidam normal qui se moque comme de son premier vélo des ces subtilités techniques intimes, c'est du parasitage. De la nuisance, comme avec un coq trop chanteur matinal, comme un volet mal callé cognant à chaque excès venteux, comme la goutte d'un robinet au joint hors d'usage. Changer le joint, resserrer l'accroche du volet, voire tuer le coq et le cuisiner avec un Passe-tout-Grains importé des environs de Meursault, rien de compliqué. Mais là, à la manière d'un immense humoriste disparue, la question est compliquée. Sans savoir qui tu es, vilain parasite, comment savoir qui tuer...? Alors, le quidam déjà cité raisonne. Comme "je paye pour voir la télé" (mais oui, déjà) il élargit son exigence, "je la veux voir bien !" Et toc. Ainsi tombent le, ou plutôt les décrets, qui imposent aux automobiles (et véhicules à moteurs) de se doter d'antiparasites. Entre 1957 et 1960, c'est aussitôt une affaire entendue. Et les lunettes arrières des automobiles s'ornent doucement de décalcomanies mentionnant la mise en place d'un filtre éliminant les troubles perçus, la RTF (Radiodiffusion Télévision Française, ancêtre de l'ORTF, "l'Office de etc.") ayant joué une rôle déterminant dans cette vague de mises à niveau. Dans cette télévision fière de ses 819 lignes, une haute définition avant la lettre, rien ne laissait encore imaginer ce que seraient les désagréables pixellisations des images numériques victimes de flux ADSL débordés...