AUTO : souvenirs d'une industrie qui semble avoir oublié charmes, audaces et diversités.

15 Mai 2024

Osons une escapade commentée, à plus d'un titre révélatrice à propos d'une doyenne déjà "quadra", et d'une réussite plus anonyme ne faisant palpiter que les plus intimes connaisseurs. Des éligibles à la carte grise de collection et hautement utilisables...!

- KELEREPUS -

- KELEREPUS, 15 mai 2024. Dans l'éditorial qu'il avait publié dans le numéro Spécial Salon de 1988, Gilles Guérithault, directeur de la rédaction de l'Auto-Journal, affirmait que l'automobile était "marquée par les diversions et par la diversité, sans égard pour les augures, qu'elle égare par son goût de l'insolite, de l'insolent". Une forêt de SUV ou assimilés cache désormais cette richesse qu'était la diversité, preuve que dans les équipes marketing des industriels, sévit une peur panique de ne pas coller aux grandes lignes des marchés, un choix qui paradoxalement les enferme dans le plus petit dénominateur commun de la profitabilité. La diversité n'étant pas que celle de la ligne, la mécanique y jouant un rôle essentiel. Dans les modèles millésimés "89" (donc tous éligibles à la carte grise dite de collection) chroniqués dans ce numéro spécial de l'AJ, se côtoyaient -au moins- deux véhicules sortant sans la moindre contestation possible de l'ordinaire, des légendes potentielles, ou déjà concrétisées. Détail, l'une est depuis montée au plus haut niveau possible des légendes, l'autre est une oubliée parmi les oubliées, en dépit de performances à faire presque pâlir des productions encore très actuelles, dans l'univers thermique que la fée électricité est loin d'avoir démodé aux yeux des utilisateurs.

La traversée historique souffle des bougies. Pas la traversée de Paris, de Nantes ou d'une quelconque sous-préfecture, mais celle d'un champ avec un panier d’œufs sur sa banquette arrière, échappant à la casse. Pour ce salon, qui ne se poussait pas encore sur ses ergots en s'autoproclamant "Mondial", l'ambiance devrait être festive sur le stand Citroën, qui célèbre les 40 ans de sa 2CV. Elle s'habille en classique ou en costume Charleston, reste discrète quant à sa fabrication finissante devenue portugaise, et se voit, encore et toujours, placée sous un argument convainquant, ses seulement 6,1 litres aux 100 kilomètres parcourus. En 2024, elle reste l'une des incontournables vedettes, de celles qui mobilisent les regards lors de tous les rassemblements.

Avec une possibilité de parcourir environ 1000 kilomètres sans faire le plein, la CX du même constructeur pourrait avoir droit à des flux de louanges au moins aussi glorieux, surtout à l'heure où les "chevaux-wattheurisées" ne sont pas toutes capables d'aller au-delà d'une distance franchissable 2, 3, voire 4 fois inférieure. Voulant vérifier, une équipe de journalistes du même magazine avait même tenté et réussi ce parcours non ravitaillé, avec une 2,5 litres Diesel, "LE" véhicule qui, dès les années 70, avait fait sortir la propulsion au gazole des bruyants parcs de taxis et des lents utilitaires (et seule véritable contestataire rapide et discrète de la domination allemande étoilée de l'époque). En 1988 (millésime 89) la version CX25-TRD-Turbo-2, (la famille CX est alors en fin de carrière) retient l'attention. Car avec une vitesse maximale annoncée à 195 km/h -.quelle honte...!.- elle revendique en consommation moyenne un appétit limité à 6,7 litres/100, (le magazine en a même mesuré une consommation "économique" de 5,5 l. aux l00) à comparer aux 6,1 de son aïeule déjà citée, de 4 décennies plus âgée. "Gazole, diesel, non mais...!" vont s'écrier les sauveteurs de la planète les plus intégristes, hurlant à la provocation. A ceci près que le moteur du principe de Monsieur Diesel est toujours reconnu comme le plus modéré de tous les thermiques en matière de rejets de gaz à effets de serre. Et que, 35 ans après les parutions évoquées ici, les rejets de particules fines ont déjà été spectaculairement réduits, et prêts à de nouvelles avancées. "Court-circuitées" par le tsunami électrique, sans qu'il soit démontré que les deux à trois recharges imposées pour les 1000 kilomètres parcourus soient réellement plus inoffensives, dans tout bilan énergétique réellement pris dans son ensemble, (seul le lieu de production de l'électricité garantissant une délocalisation hypocrite de la giclée polluante). Côté technicité, le modèle CX profitait d'un... CX à 0,34, contre 0,51 pour la bonne vieille dodoche... Le progrès, comme disent certains, c'est dans l'air...