Un seul jour pour la musique, cela fait peu. Mais ce moment, décliné sur plusieurs jours, est aussi l'occasion d'une atmosphère qui se propage largement au-delà des scènes éphémères. Et d'une petite larme, à cause d'une disparition inquiétante.
- KELEREPUS -
- KELEREPUS, 21 juin 2023. Non, pas d'erreur, ce sont bien les "Fêtes" et pas seulement "la" fête de la musique dont il est question. Ne serait-ce que parce que ce 21 juin qui tombe en milieu de semaine n'est pas pratique pour tout le monde. Et comme chacun peut le constater, en toutes régions, cette festivité musicale se prolonge au moins jusqu'au week-end. Et d'ailleurs, elle était déjà dans l'air à la moindre occasion. Demandez si, à Clisson il n'y a que quelques jours, les spectateurs du Hellfest-2023 n'étaient pas sans plus attendre dans cette sensation anticipante...
Il reste que le terme "fête" implique un peu plus que la musique "tout court". "Air de fête" est sûrement la bonne expression, pour cette douce et émoustillante capillarité à laquelle pas une attention n'échappe. Des instruments se promènent dans des étuis. Des exécutants se rencontrent, re-rencontrent, retrouvailles et sympathisailles se multiplient, comme ces refrains que l'on n'ose plus arrêter. La musique commence par un parfum d'un moment sans pareil, venant briser le train-train quotidien. Avant de s'ébrouer, déjà, elle se voit. Doublement "à l'œil", gratuite, et hautement visible... Les images le prouvent.
Emoustillé, le quidam qui passe...? Ce n'est pourtant que le hors d'oeuvre d'un menu aux saveurs exquises en préparation. On s'installe, on balance, on commence à émettre quelques notes, on s'accorde... Et ça démarre. Rideau...! Même s'il n'y a en général pas de rideau. Les accords se plaquent, les caisses claires frétillent, les claviers transforment le noir et blanc en une touche multicolore qui fait se réveiller les ardeurs dansantes.
Ici limité au simple minimum, là déjà spectacle grandiose et bien bâti, toutes les dimensions se côtoient. Encore une petite perturbation qui, donc, se glisse dans le vocabulaire. La Fête de la Musique, que nous cherchions déjà à convertir en "Fêtes" au pluriel, est soumise à un nouveau singulier manque d'à propos. Ne seraient-ce pas plutôt "les musiques"...? Les amateurs et les pros, sur des podiums éphémères, ou des scènes de festivals, se multiplient sur un commun accord, musique...!
Entre des exécutants presque "de passage" et des groupes aux récitals bien rodés, pourquoi vouloir hiérarchiser...? Puisqu'une onde fébrile se propage des pavillons jusqu'aux échines. Pavillons des enceintes et des oreilles, cette musique vécue en vrai laisse soudain réapparaître un détail que l'oreillette intra-auriculaire, méchante simulatrice, avait presque occulté. La mélodie, le bœuf, le métal, le R&B, le jazz et même la java, tout cela se consomme avec tout le corps. L'expression familière "ça vous prend aux tripes" a enfin sa justification.
À voir cette avalanche de mélodies se laisser contempler, cette restriction d'un jour, un jour seulement, devient très illusoire. Les petits airs en vrai comme les jolis concerts en formes abouties ponctuent des quantités de moments, d'événements, chaque jour que le soleil éclaire de ses rayons. Tous les grands moments de la vie ne sont-ils pas musicalement ponctués...?
Toutefois, des podiums jusqu'à la rue, il n'y a pas plus de frontière, ni temporelle, ni autre. A l'exception de la seule vraie frontière qui non seulement ne disparaît pas, mais s'est même renforcée au fil du temps. C'est celle de ces instruments pour tous que Monsieur Tout le Monde ne voit plus comme avant, à l'angle d'une avenue, au cœur d'une galerie marchande. Comme pour de nombreux loisirs "avec de la technique dedans", la distribution spécialisée musique s'est dans d'énormes proportions volatilisée, soufflée par les vents promotionnels du Net, faisant disparaître la rencontre possible entre des amateurs qui n'avaient pas encore conscience de leur capacité à sombrer dans un plaisir-loisir. Le contraste entre l'attrait de la musique qui vient et vibre dans la rue et l'impossible opportunité de cette séduction au gré des magasins et des rayons n'est pas à la hauteur des promesses d'un commerce que certains croient devenu moderne. Dommage, ça gâte un peu la fête... (Impératif, il va falloir y revenir...!)