S'il est possible de se laisser guider pour la découverte des meilleurs crus de nos vignobles, découvrir les qualités d'une photo, comme celles d'une restitution musicale, est à la portée de tous. Non sans quelques similitudes !
- KELEREPUS, 7 octobre 2022. La tenue d'un salon spécialisé est l'opportunité idéale pour se livrer à ce plongeon vers des sensations trop souvent insoupçonnées. Le Salon de la Photo de Paris, qui a ouvert ses portes hier, précède de quelques semaines le Paris Audio Vidéo Show. Ils arrivent à point nommé pour multiplier les expériences. Côté son, le "savoir écouter" semble faire allusion aux pouvoirs d'une population à part, presque une secte, celle des "audiophiles". Grands excès de vocabulaire pour ce qui n'est rien d'autre qu'une bonne habitude de l'écoute. Car dans la réalité, il n'est guère besoin de se livrer à des exercices savants pour décortiquer ce que l'on entend. Depuis l'avènement de la stéréophonie, cela commence par repérer ce que les esthètes de l'art hi-fiste appellent les "plans sonores". Cruel pour les adeptes de la photo, fermer les yeux y peut être d'un grand secours. D'où viennent, de droite et tout près, de gauche un peu plus loin, les notes émises par certains instruments. A ce petit jeu, il est facile de s'apercevoir que, en changeant de place, les perceptions "bougent" aussi. Il en serait de même face à un concert vivant (ou à la mélodie venue d'un instrumentiste tout seul...). L'attention peut ensuite (dans le sens de ce qui est écrit ici, mais d'abord, si l'auditeur le préfère) se porter sur le rendu de certains sons, puis des autres. Nets, parfois cristallins, ou plus confus... Ampleur des cuivres (à vent, trompettes, saxophones...), finesse des violons, violoncelle... Les délicates gradations sont aussi faciles à percevoir, entre le plus intense et le plus subtil (on appelle ça la dynamique) Ah ! C'est pour de la musique classique, pensent déjà certains. Non, même remarque pour du jazz, et des variétés, du rock, du rapp, de la sardane du pays catalan, et même, si opportunité, de ce musicien de la rue ou du couloir du métro. Oui, mais enfin, rétorqueront non sans pertinence d'autres quidams (ou dames) attentifs : dans le moderne, tout est fait en studio, rien à voir donc avec une salle de concert et tous ces paramètres... Presque exact, mais dans les studios, travaillent des ingénieurs du son qui ont une solide habitude dans leur rapport à la musique et savent aussi générer par leurs choix techniques des "sensations" prêtes à découvrir et déguster.
Pour l'image, l'analyse est à la fois gratuite et à l'œil, n'imposant pas davantage de sacrifice. Même pas besoin de se boucher les oreilles, cet œil, attentif à tous les détails, suffit. Comme pour le son, le méthodique (au début, après, cela devient vite instinctif et automatique) constitue la règle fondamentale. La finesses (rendu des feuillages, objets en matières, bois, métaux, tissus, eau, épidermes, regards...), les lumières, les ombres, le dégradé entre le clair et le sombre, les lumières et les ombres (on appelle ça la dynamique), le rendu des couleurs. Sans oublier, ce qui serait trop bête, de tout naturellement s'attarder sur l'ensemble, le cadrage. Estimer les effets liés à l'emploi d'optiques différentes, du zoom qui écrase l'éloignée au grand angle et son apport d'espace, s'acquiert plus facilement par la pratique de la prise de vue. La part du ciel, du sujet, des éléments autour du sujet, d'une ou de plusieurs "images dans l'image", le ou les seconds plans et arrière-plans, l'atmosphère, sereine, pesante, coquine, appétissante, repoussante, inquiétante, révélatrice, le net et le flou... Il y a tant à voir, on y passerait des heures.
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Vient quand même le point où les chemins se séparent, entre musique et image, notamment dans un détail d'usage très élémentaire. Il y a bien plus d'individus qui ont fait, font et feront des photos que de personnes jouant de la musique. La photographie est une "activité", la musique et son écoute étant davantage passive. Si l'analyse des clichés est un préalable très utile pour réussir soi-même des prises de vues telles que chacun les souhaite, elle devient la piste à suivre pour savoir manipuler des équipements (boîtiers et optiques, ou smartphones) sur un plan purement technique. Pourtant, au "bout du bout", musique et photo restent tributaires de la large expérience allant de la perception à la création, et inversement. Voilà le petit bout de la ficelle, à chacun de la tirer selon ses envies.