MONDIAL DE L'AUTO. Chacun se rappelle les rendez-vous importants qu'il a pu avoir dans la vie. Et encore plus les rendez-vous manqués. La "bagnole" risque de se souvenir longtemps de celui de 2022, Porte de Versailles.
- KELEREPUS, 22 octobre 2022. La fête va prendre fin. Supposée fête. Les lumières du Mondial de l'Automobile seront éteintes dès demain. Pour deux ans, en principe. Ou pour toujours, selon quelques avis pessimistes, et néanmoins plutôt éclairés. Des doutes bien réels sont en effet ressentis quant à la possibilité de voir encore un tel rendez-vous se tenir dans le futur, ne serait-ce qu'en raison du nombre croissant d'exposants majeurs du vrai monde de l'auto. Les déçus de 2022 sont déjà nombreux, aigris. Des messages reçus le confirment. On ne les y reprendra pas de sitôt. Que regrettent-ils dans ce qu'ils ont vu, ou pire, pas vu ? Une évolution de l'automobile par elle-même sans retour, ou la fin d'un grand moment où l'on pouvait rêver. Voire, les deux à la fois. Si le salon de 2024 réussit à exister, il ponctuera un peu moins d'un siècle, mais 90 ans, d'une lente métamorphose. 1934 ne fut en effet pas un salon comme les autres. Parce qu'y naissait une automobile créée en France, qui faisait exploser le profil de son créateur, André Citroën, ainsi que l'art, ma manière et l'esprit de cette industrie. Cette apparition entrait dans un contexte mondial (en tout cas occidental) fort particulier. Certes, depuis cinq ans, les Etats Unis vivaient les suites de la terrible crise de 1929. Mais l'automobile s'y était prodigieusement développée. Après les ondes négatives et les conséquences désastreuses du premier conflit mondial, l'Amérique avait rebondi, et l'auto avait transcendé la vie des ménages américains. Se déplacer, seul, à sa guise, quelle conquête.! Elle avait de surcroit et notamment fait naître le tourisme, les week-end, les vacances, les motels. L'Europe n'avait pas à cette époque de retard technique, mais l'ampleur de la production industrielle y était très nettement en retrait par rapport ce qu'elle commençait à décrire comme le rêve américain. L'auto en France, (son véritable pays "natal") suivait à son rythme une évolution à sa manière.
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Pas de doute, au salon 1934, l'attraction fut justement... la Traction. Au Grand Palais, c'est la grande foule. Sur le stand de la firme aux chevrons, de nombreuses versions de cette nouvelle auto (commercialisée peu après), dont la célèbre et mystérieuse 22, brillent comme des symboles. Certes, les roues avant motrices constituent un tournant, tout comme l'aérodynamisme des carrosseries, et la conception "monocoque". En filigrane de ces points strictement matériels, une autre perspective pointe le bout de son évidence.: la grande série. La voiture pour tous est en train de naître. C'est une autre aventure que celle des châssis, des grands carrossiers, des véhicules pour les fortunés qui s'affrontent dans des concours d'élégance. Une page commence à se tourner. Grands couturiers et belles conduites intérieures dans l'ambiance de Bagatelle intéressent moins que ces cardans (dont ceux qui, sur la plus qu'éphémère et maudite 22, dotée d'un puissant V8 d'importation, lâcheront, précipitant dans la mort un démonstrateur et son possible client), et toute cette technique, au demeurant mal maîtrisée. C'est bien une révolution qui, dans le réseau de la marque, pas assez informé, pas assez préparé, pas assez épaulé, fait naître une tout autre sensation, une sorte de "citro-haine", à propos de soucis rencontrés par les clients et sans que des solutions soient immédiatement disponibles (il en sera de même à la naissance, dans les années 50, de la DS). L'automobile, et plus largement les techniques de transports, calqueraient-elles leurs générations sur celles de l'homme qui, en attendant mieux, est plutôt octo ou nonagénaire que centenaire.? Après des débuts un peu flous, les chemins de fer avaient trouvé leur voie dès les années 40-50 (comprenez bien sûr 1840-1850). L'avion, plus rapide dans les airs, mettra il est vrai un peu moins de temps à prendre son envol dans ce sens, qui colle à la génération "Traction", de l'accessibilité à tous. Il est probable que sans la seconde guerre mondiale, au moins 10 à 15 ans auraient été gagnés dans l'épanouissement de cette voiture populaire (les travaux dans les bureaux d'études aux époques évoquées le démontrent). Cette fête, jadis immense moment de la féérie parisienne, qui prend fin demain pourrait bien conclure une fête de près d'un siècle. Sauf que l'auto n'est pas encore morte, surtout si chacun s'emploie à différer un trépas que, semble-t-il, des tenants d'une philosophie écolo-autophobe voudraient bien précipiter. On les attend.
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