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SM Citroën, Monica, Facel… et quelques autres modèles du "haut de gamme" français seraient morts des suites des chocs pétroliers d'il y a 45 ans. Mauvaise analyse ou mensonge…?

- KELEREPUS, 12 mars 2021. Tant pis pour les convenances… Si les chocs pétroliers avaient véritablement été les fossoyeurs des hauts de gammes de l'automobile made in France, "cela se saurait", comme l'affirme la formule classique (et un peu "café du commerce"). A force de l'avoir utilisée à répétition, elle en arrive à ressembler à une vérité historique. En réalité, le début symbolique de l'enterrement des véhicules destinés aux consommateurs ayant de larges moyens pourrait être fixé à l'année 1964. C'est au cours de ce millésime que la procédure de règlement judiciaire du français Facel (Forges et Ateliers de Construction d'Eure et Loir) n'est pas prolongée, sur instruction du ministère des finances, (sous la houlette du ministre, Valéry Giscard d'Estaing...!). Pour cette belle lignée, point de souci pétrolier à évoquer. L'origine de ce couac est de pure nature protectionniste.

N'ayant pas été autorisé à importer des moteurs pour son "petit" modèle, la Facellia, le constructeur a dû se contenter de moteurs fabriqués en France par Pont-à-Mousson, hélas en ribambelle défaillants. Alors que l'entreprise est sur la voie d'un renouveau, après remplacé à ses frais des centaines de mécaniques par des 4 cylindres Volvo (opération si coûteuse qu'elle l'a entraîné au dépôt de bilan), et qu'elle bénéficie d'une image malgré tout redevenant positive, c'est le stop autoritaire tombé d'en haut, condamnation à mort*. Redoutait-on une concurrence sur les pseudos hauts de gammes des Renault, Citroën, Peugeot…? L'industrie automobile en France était, par la volonté d'un Etat, devenue dès l'après-guerre surtout un instrument social et politique, à travers une Régie (Renault) qui rythme le calendrier avec ses congés du mois d'août et la facette populaire où se mélangent les salaires, les grèves, les syndicats… Le tout coiffé d'une volonté de piloter l'industrie et les cocoricos pour auto-satisfaction qu'elle sous-entend (en dépit d'échecs cuisants en exportations…) Hélas, une industrie ne peut échapper à l'impératif d'être une activité faite pour produire et vendre le plus possible, et rien d'autre.

Produire avec une qualité irréprochable, ce qui était loin d'être acquis, même plus récemment. Aux portes de la collection "officiellement admise" (donc 30 ans d'âge) voici ce que mentionnait dans son Spécial Salon de 1992 l'Auto-Journal à propos de la jeune Peugeot 605 : "La 605, chaleureusement accueillie lors de sa naissance en septembre 1989, a connu quelques déboires depuis. Ses excellentes prestations sur la route ont été ruinées par une réputation de fiabilité douteuse qui a brisé net sa carrière.Très courageusement, Peugeot a procédé ce printemps à une "remise à niveau" gratuite de toutes les 605 produites, en rappelant les voitures dans le réseau, et même, pour les SV24, à l'usine." De quoi faire sourire les utilisateurs de berlines d'outre-Rhin parcourant des dizaines et même centaines de milliers de kilomètres, en se contentant d'un entretien normal.

Ajoutons, au risque de choquer, que nos modèles les plus prestigieux ne sont pas toujours des réussites techniques et esthétiques absolues. Vénérée aujourd'hui, la DS de Citroën fut initialement accueillie avec des commentaires assez peu élogieux tant sur son style "crapeau" que sa technique, certes d'avant-garde, mais aussi usine à gaz non fiabilisée, posant des problèmes majeurs au réseau de la marque, de surcroît insuffisamment formé pour l'après-vente sur des solutions innovantes mal finalisées. La SM du même constructeur aura du mal à convaincre ceux qui ont dépensé autant pour s'offrir des Mercedes ou des Jaguar, voire un "fast-back" Mustang (Ford US), un peu savonnette quand on l'excite, mais au plumage et au ramage (l'onctueux "louloulouloulou" du V8 inimitable) sollicitant toutes les attentions. Sans doute ni réellement sportive, ni réellement ultra-confortable, la mi-grand tourisme mi-sportive n'est finalement ni l'un ni l'autre, renoue avec les soucis liés à une mécanique venue de Maserati, bien fragile.

De son côté, le projet Monica, prénom de l'épouse d'un constructeur de wagons citernes cherchant à se lancer sur le prestige automobile, est sans doute plus réussi, avec un style et des solutions mécaniques extrêmement prudentes et rassurantes. Mais un ver est dans le fruit. Il est lié à ce mal français éternel, la fiscalité. Plus que punitive dès que la puissance… (fiscale, évidemment) fait mine de grimper, elle tue dans l'œuf tout ce qui pourrait permettre un développement cohérent. Pas un trombone, pas un classeur, rue de Rivoli (Bercy n'est pas encore construit) n'a sans doute eu à prendre en considération des archives où se seraient côtoyés des gloires de l'automobile française d'hier, parfaitement assimilables à nos aptitudes mondialement reconnues dans l'univers du luxe, ce qui est toujours d'actualité en 2021.

"La crise du pétrole de 1974 a fait échouer tous ces projets" ont affirmé et affirment encore nos grands théoriciens de l'économie, tous professeurs d'universités, chercheurs au CNRS, philosophes ou équivalents, experts en chambre et commentateurs pour plateaux TV, mais bien peu observateurs pragmatiques "de terrain". "Le pétrole m'a tuer" est une accusation mensongère comme l'actualité en a connu d'autres, destinée -plus ou moins volontairement- à détourner l'attention de tout enquêteur. En effet, dans le même temps, comment les BMW, Audi, Mercedes, Porsche et autres industriels allemands ont-ils réussi, justement dans cette période difficile, et face à ce même séisme de l'or noir, à se tailler des statures à l'échelon mondial…? Inutile d'argumenter davantage. Les collectionneurs n'ont naturellement pas à souffrir de cette réalité. Conserver de belles anciennes est un loisir davantage associé à la culture des souvenirs, réminiscence d'époques révolues et théâtre d'heures heureuses et d'atmosphères pas très éloignées d'une onctueuse nostalgie. Mais cessons d'utiliser des mensonges pour corriger a posteriori des faiblesses coupables.  

* Quand on songe au nombre de canards boiteux aux pertes abyssales que l'Etat aura renfloué avec les fonds venus des contribuables, la moutarde d'une légitime colère ne peut que monter au nez...

 

 

Tag(s) : #- AUTOS D'HIER, #- ACTUS
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