Les SUV portent depuis peu un chapeau qui n'est pas à leur taille. Ce style d'automobile actuellement en vogue n'est en rien le cluster d'une pollution redoutable. Il s'inscrit même dans la ligne de plus en plus propre du monde de l'automobile, même sans l'apport de l'électricité.
- KELEREPUS, 10 octobre 2020. OK, qu'une catégorie de véhicules soit désignée par un sigle qui intègre une facette Sport et Utilité n'est pas loin d'un défi. Le sport et l'auto ne font plus bon ménage dans les esprits chagrins de la génération anti-tout. L'utilité, c'est plus sérieux, plus vaste et, prudence, plutôt non commenté. Mais à attaquer sur des bases techniquement contestables, tout organisme ou entité ne risque que le ridicule. L'offensive quasi mensongère de certains groupes d'influence tendance verdâtre à l'égard de ces véhicules entrant dans la catégorie des SUV n'est que l'interminable prolongement d'une arrivée sur le marché, il y a un peu plus d'une quinzaine d'années, de ce que le public baptisait de l'expression "gros 4x4", aux oreilles de certains proche cousine de l'étiquetage "salauds de riches". Comme une réplique à la ligne britannique du Range Rover, un tout terrain de luxe, apte au franchissement comme aux moyennes très soutenues sur autoroutes dans un confort princier, sortait alors des usines Porsche le modèle baptisé Cayenne. Un engin vite décrié car jugé trop généreux sous tous les angles, de la consommation de sa gourmande motorisation à sa supposée contribution à la dislocation de la banquise. Mais dans un style "outre-Rhin", très différent de celui de la contrée de sa Gracieuse Majesté. Ce premier "4 portes" de l'histoire Porsche était sorte d'édition d'un produit pour ceux qui aiment Mercedes plutôt que Rover, Audi plutôt que Jaguar, BMW plutôt que Rolls (aujourd'hui membres du même groupe industriel). Déclinés de ces objets pour tirelires en surpoids, une tendance un peu imitatrice s'est depuis développée à des niveaux de gammes de plus en plus accessibles allant jusqu'au très grand public.
Ce concept ne s'est pas installé à la place des berlines d'hier. Il s'est doucement inscrit en tant que successeur d'un monospace dont le style, après avoir été vu et revu, commençait à se rider. Ce dernier, dont l'invention est revendiquée par l'alliance Matra-Renault avec l'Espace*, a eu tant de succès qu'il s'est déployé chez pratiquement tous les constructeurs, en variétés grandes, moyennes et compactes (n'entrons pas ici dans la farandole des classes chères à l'industrie). Or, n'en déplaise aux écolo-contestataires, cette appétence des consommateurs ne fut en rien liée ni à un goût du luxe, ni à une envie d'épuiser au plus vite les richesses terrestres en huile de roche (les monospaces ne consommaient pas plus que les versions conventionnelles de niveau équivalent), mais à des réalités fort terre à terre rencontrées par la plus ordinaire France des familles. De quoi résumer en trois axes les raisons de cette lente métamorphose des véhicules.
Famille et commerce. Quand le monospace apparaît, au début des années 1980, les ménages sont désormais très nombreux à compter plusieurs membres, un couple et des enfants. Et à cette époque, la distribution en périphérie des villes devient prépondérante. Or, on ne va pas à l'hypermarché ou au centre commercial s'approvisionner pour 4 à 6 personnes avec le coffre devenu bien exigu d'une berline moyenne, encore moins avec celui d'une simple citadine. Le volume (on peut aussi dire… "l'espace") généreux est aussi le bienvenu quand la cloche sonne, que l'école est finie, et que vient l'heure des vacances. Si tant de foyers se sont dotés de monospaces, c'est moins pour leur charme que pour leur grande utilité.
Mieux nourri, l'homme grandit, l'auto aussi. Pour se loger sur les sièges d'une 2CV Citroën, il ne fallait pas être trop corpulent. Avec 1,49 mètre de large (et pas beaucoup plus pour les véhicules de la même époque)**, s'installer dans de telles anciennes, qui pour autant ne manquent pas de charme, il ne faut négliger aucune des solutions façon Comme j'aime. Sans doute grâce à une nourriture plus riche, après les années difficiles d'après-guerre, les individus ont grandi. L'industrie du vêtement même été contrainte de faire comme l'automobile : revoir ses tailles.
Sécurité active et passive. Certes, pour se mettre en conformité avec les mensurations usuelles de la génération nouvelle, l'automobile a pris du tour de taille et du poids. Ce qui n'a pas empêché les industriels d'en diviser la consommation par des facteurs énormes. D'ailleurs, la consommation pétrolière qui frisait les 100 millions de tonnes en 1980, n'en était plus qu'à 73 millions en 2019, avec un parc automobile ayant presque doublé (en partie grâce à la montée en flèche du multi équipement des ménages)***. Mais cette prise de poids a aussi été provoquée par une autre évolution, celle de la sécurité. Pour créer des habitacles qui ne se déforment plus autant, qui freinent mieux et sans dévier, qui permettent de rouler au calme, sans courant d'air (grâce à la climatisation que certains n'oublieront pas de critiquer "vertement"), vitres non embuées, etc., il n'était pas possible d'atteindre des résultats satisfaisants sans entraîner un alourdissement. Attribuer au luxe ce qui permet de sauver des vies est non seulement une contre vérité, mais un argument indigne.
Enfin, à l'aide de quelques chiffres choisis avec un malicieux dessein et d'une mauvaise foi à la hauteur de certaines ignorances, ont été propagées des comparaisons qui ne grandissent pas ceux qui en font usage. Concernant la Renault Captur, montrée d'un doigt vengeur comme le symbole du SUV en surpoids qu'il conviendrait de surfiscaliser, observons qu'il pèse une centaine de kilos de moins que la Mégane, petite berline d'un niveau de gamme équivalent. Selon le principe connu, il est possible de faire dire ce que l'on veut à des données chiffrées, même affirmer ce qui est contraire à la vérité. L'un des derniers SUV dévoilé par un constructeur vient souligner que cette dénomination n'est en rien synonyme de pollution grand luxe. Il s'agit d'une nouvelle version du Duster, le SUV de Dacia, du groupe Renault, lequel est proposé (comme toute la nouvelle gamme Dacia) avec une carburation au GPL, carburant aux rejets nuls. CQFD.
* En fait, suite à une genèse moins simple, avec des chromosomes d'origine diverses.
** Egalement 1,49m pour la 4L, 1,58m pour la Facellia (Facel-Vega), La première Golf GTI, millésime 1976 et au-delà, ne dépasse pas 1,63m, alors que la Polo 2019 du même constructeur accuse 1,75m d'envergure. On ne relève pas plus de 1,73m pour la CX GTI Citroën lancée en 1978. De nombreux véhicules, même en entrée de gamme, atteignent et même dépassent 1,80m.
*** Un peu moins de 21 millions en 1980, plus de 39 millions en 2018).