Air France sort aujourd'hui de sa flotte son premier A380, début de la fin d'exploitation commerciale de ce géant, arrivé après l'heure à la porte d'embarquement.
- KELEREPUS, 24 février 2020. C'est déjà l'heure de la sortie pour le mastodonte européen. Une bonne raison de lui faire une place dans la panoplie des utilisateurs de FlightSim et autres softs pour voler en chambre. Nombreux sont les amateurs de simulation de vol qui éprouvent un intérêt sans limite pour les aéronefs réels, leur carrière, leur conception, leurs qualités et leurs petits travers. D'où les trésors de précision que les développeurs, professionnels ou amateurs, déploient quand ils réalisent les versions software des machines destinées à évoluer sur les écrans. Pour ce gros porteur européen, sa carrière brève lui donne un attrait particulier. L'Airbus A380 n'est pourtant pas le premier appareil à n'avoir vécu que d'une manière éphémère, avant d'être écarté pour des raisons uniquement commerciales.
ÉVOCATION. Marché manqué ? Oui, pour être arrivé trop tard dans l'ère des très gros porteurs, l'A380 a manqué une cible qui... n'en était déjà plus une. La production est arrêtée, et progressivement, les appareils vont se glisser au mieux chez de nouveaux exploitants, au pire, à la casse. L'illusion d'un succès initial ne fut peut-être que le résultat de compagnies du Proche-Orient avides d'initiatives spectaculaires, et ne comptant que sur leur source supposée inépuisable de pétrodollars. Comment, dès lors, ne pas repenser à ces années d'interminables tergiversations à propos de ce gros porteur, le projet "XXX", qui a finalement mis trop de temps pour trouver sa clientèle. Il faut aussi se rappeler des retards purement techniques qui ont émaillé la cadence de ses livraisons initiales, avec parfois même des incompatibilités entre des sous-ensembles produits par des usines d'Airbus (notamment allemandes) à revoir complètement une fois arrivés à Toulouse pour l'assemblage final. Autant de péripéties qui n'auraient cependant pas totalement changé la destinée de ce gros appareil, alors que le 747 de Boeing, lancé dès le début des années 70, avait accompagné le développement des liaisons à très longue distance parallèlement à celui du commerce entre l'Asie et le monde occidental. Aujourd'hui, franchir sans escale des trajets de 10.000 km ou plus n'est plus une difficulté. En revanche, pour les compagnies aériennes, il faut davantage de souplesse, et donc des avions moins grands, afin d'élargir les offres en termes d'horaires. Plus question désormais de transporter 350 à 400 personnes dans un vol quotidien entre Londres et Tokyo ou entre Chicago et Hong-Kong. Il faut maintenant pouvoir offrir à bien plus de "PAX" des espaces de 250, voire 200 places, dans un choix de 4 ou 5 liaisons quotidiennes, une partant le matin, une autre à la mi-journée, une troisième en fin d'après-midi et une en soirée, presque tardivement. La perspective de voir des monocouloirs sur des liaisons moyennement longues (vols transatlantiques) où la concurrence est colossale devient même très concrète. Que faire aujourd'hui et dans 15 à 30 ans d'une machine énorme en contradiction avec les impératifs du marché...?
Si l'A380 tire sa révérence, il n'est pas le premier à le faire aussi prématurément. Ce fut aussi le cas des Lockheed Super Constellation (photo), évolution agrandie et "compressée" du Constellation (au niveau des moteurs...) qui, par exemple, n'a pas dépassé une décennie d'utilisation chez Air France, en dépit d'une immense satisfaction, sans aucun ennui, mais poussé vers la sortie par les premiers jets, Douglas DC8 et Boeing 707. La génération des appareils à turbopropulseurs, tels que le Vickers Vanguard ou le Lockheed Electra (hélas victime de quelques accidents) a subi un sort quasi identique. La collection des anciens vient de s'enrichir d'une nouvelle pépite. On s'aligne. Dernier vent…?